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Mathieu Hidalf n'aurait jamais dû provoquer son père, qui a concocté une vengeance impitoyable : marier son fils à Marie-Marie du Château Boisé, la plus riche héritière du royaume. Le génie de la bêtise ne dispose que de sept jours pour empêcher cette catastrophe... bientôt suivie d'une autre : des élèves de l'école de l'Élite sont brutalement attaqués. Aussitôt, l'établissement est isolé du reste du monde par le sortilège de Ronces ! Débusquer un traître, protéger la Foudre fantôme des frères Estaffes tout en cherchant une parade à son union avec Marie-Marie, Mathieu Hidalf a plus d'un défi à relever !
En librairie le 27 septembre - 400 pages - 15 euros
Il fut un temps où les adultes, lorsqu'ils rencontraient Mathieu Hidalf dans une allée du château royal, lui pinçaient la joue en s'exclamant : « Comme vous avez grandi ! » Le dernier imbécile qui eût commis une telle imprudence la regretta si amèrement qu'il n'osa plus croiser la route du moindre enfant. On raconte qu'il confia les siens à une ogresse, afin qu'elle en fît de la chair à pâté.
Au fil des années, Mathieu Hidalf était parvenu à se faire craindre des plus hautes instances du royaume. À seulement onze ans, la liste de ses ennemis personnels, qui regroupait autrefois des dizaines de noms, n'en comptait plus que deux ou trois. Car depuis longtemps, la plupart de ses opposants avaient renoncé à lutter contre lui. Du moins Mathieu Hidalf en était-il convaincu...Opéra, château royal, 21 h 01– Mathieu Hidalf, commença le reporter Olivier Tilleul, un colosse de deux mètres de haut plus large qu'un chêne, il y a bientôt deux mois, vous êtes devenu le tout premier élève de l'école de l'Élite à y accéder en trichant. Une fois dans l'école, votre épreuve a consisté à traquer la Foudre fantôme : une biche légendaire, plus rapide que l'éclair et plus insaisissable que le vent. Les redoutables frères Estaffes en personne ne sont jamais parvenus, qu'ils me pardonnent cette expression, à repérer la moindre de ses empreintes... Le capitaine Louis Serra lui-même, malgré son génie, a consacré des mois entiers à la traquer, en vain... En quatre siècles, plus de sept cent cinquante élèves ont eu pour mission de la capturer. Un seul y est parvenu... Vous avez réussi l'impossible, Mathieu Hidalf, en vous saisissant de la Foudre fantôme en seulement quatre semaines.Olivier Tilleul était le reporter attitré de Mathieu Hidalf à L'Astre du jour, le plus grand quotidien du royaume. Mathieu lui adressa un signe de tête confiant. Il était assis dans la loge royale d'un gigantesque opéra, le coeur battant légèrement plus vite que de coutume. L'oeil vif, l'esprit aux aguets, il tenait d'une main ferme ses notes innombrables.Tous les fauteuils avaient été réservés. Personne ne voulait manquer la conférence de presse de l'enfant le plus célèbre du royaume. Le parterre débordait de journalistes. Et autour de Mathieu, chaque loge accueillait les plus illustres familles de la noblesse astrienne. Mathieu jeta un regard à celle des Hidalf, dans laquelle Juliette d'Or, sa soeur aînée, venait seulement d'arriver, le teint légèrement empourpré. La jeune fille prit place entre ses deux soeurs, l'hypocrite Juliette d'Argent et la brillante Juliette d'Airain. Les trois demoiselles ne semblaient guère préoccupées par l'événement qui tenait le royaume en éveil ; depuis que leur frère avait capturé la Foudre fantôme, la presse entière n'avait d'yeux que pour lui.Une semaine plus tôt, le père de Mathieu, qui avait coutume d'être l'homme le plus sévère, le plus orgueilleux et le plus prévisible du monde, avait fait irruption dans la chambre de son fils. Vêtu de son habit rouge et or des grands jours, Rigor Hidalf avait annoncé, avec l'aplomb d'une statue de marbre :– Je viens d'avoir une idée de génie. Mathieu avait dévisagé son père avec curiosité : avoir des idées, mêmes mauvaises, n'était pas dans les habitudes de celui-ci.– Tu sais que, tous les ans, je tiens une grande conférence de presse, n'est-ce pas ? avait repris M. Hidalf d'un ton ferme.Mathieu avait haussé légèrement le sourcil droit, de plus en plus surpris. Tous les ans, en effet, son père organisait une conférence de presse, afin de tenir le royaume informé de ses dernières décisions. Hélas ! les décisions de ce grand homme n'intéressant que lui, M. Hidalf était contraint de payer des figurants pour qu'ils lui posent quelques questions.– Cette année, avait-il expliqué en écartant les bras, j'ai décidé que tu m'accompagnerais pour affronter la presse, Mathieu ! Sais-tu ce qu'il s'est produit lorsque j'ai évoqué cette possibilité à la rédaction de L'Astre du jour ? Hector du Château Boisé, le premier actionnaire du journal, a promis d'en faire sa une. Il a réservé l'opéra royal ! L'opéra royal ! Tout le royaume sera présent ! Tout le royaume veut savoir comment tu as attrapé cette stupide créature à quatre pattes...– La Foudre fantôme, avait précisé Mathieu, d'un air contrarié.– Nous ne pouvons manquer une telle occasion d'humilier le reste de la noblesse. C'est la gloire assurée ! Mathieu, mon garçon, qu'en dis-tu ?Mathieu Hidalf avait accepté, à une seule condition : son père ne participerait pas à l'événement. Voilà comment, en l'espace d'une minute, la conférence de presse de M. Rigor Hidalf était devenue celle de son fils.Mathieu, seul face à la foule muette, reposa calmement ses notes. Il avait préparé cet événement des heures durant avec son reporter attitré. Pourtant, quelque chose l'embarrassait. Quelque chose qui n'avait rien à voir avec le trac. Mais plutôt avec un mauvais pressentiment. Il releva les yeux vers Olivier Tilleul, pour lui indiquer de poursuivre l'interview.
– Mais vous étiez célèbre bien avant d'entrer à l'école des Élitiens, affirma celui-ci d'une voix rauque. Il y a un an et deux mois, Mathieu Hidalf, vous êtes devenu une légende... en réussissant ce que la plupart de vos admirateurs et de vos ennemis considèrent encore comme votre chef-d'oeuvre.
Quelques commentaires animèrent le parterre. Chacun avait déjà compris ce à quoi le journaliste faisait allusion.
– Vous avez marié Sa Majesté le roi, contre son gré, à une vieille sorcière... Une sorcière connue sous le nom de « grand-mère édentée »... Pour y parvenir, vous avez endormi tout un royaume, manipulé deux consuls, utilisé votre propre père. Et vous avez même eu l'audace d'humilier un Élitien.
En entendant ces mots, Mathieu Hidalf sentit les battements de son cœur s'accélérer. Lors des répétitions, jamais il n'avait été question de cet Élitien. Un silence attentif régnait sur les loges plongées dans la pénombre. Le reporter de Mathieu cessa de sourire et demanda fermement :
– Je ne vous poserai qu'une seule question ce soir, Mathieu Hidalf. Je suppose que vous vous l'êtes souvent posée. N'avez-vous jamais craint des représailles?
Le temps se figea autour de Mathieu. Il savait reconnaître une menace. En une seconde, tous les voyants de son intelligence s'activèrent et tentèrent de mesurer l'ampleur des risques. Un sourire de défi se dessina sur son visage, tandis que des commentaires s'élevaient dans les loges. Peu à peu, les membres de la noblesse prenaient conscience que quelque chose se tramait. Le reporter de L'Astre du jour répéta d'une voix qui retentit dans tout l'opéra :
– Mathieu Hidalf, n'avez-vous jamais craint des représailles ?
À quelques loges de la sienne, Mathieu aperçut trois élèves de l'école de l'Élite avec lesquels il avait accompli sa première épreuve. Deux garçons blonds, Pierre Chapelier et Octave Jurençon, treize ans passés, avaient braqué une longue-vue dans sa direction. À côté d'eux, Roméo Pompous, le troisième ami de Mathieu, avait pointé ses jumelles sur la loge des Hidalf, dans laquelle il épiait sans doute Juliette d'Or, à en juger par son teint écarlate. Mathieu vit alors Octave Jurençon lui adresser un signe de la main. Un signe qui semblait l'inciter à prendre la fuite. Mais il fallait davantage qu'une question dérangeante pour faire fuir Mathieu Hidalf.
– Olivier Tilleul, répondit-il avec un calme surprenant, je ne suis qu'un enfant de onze ans. Croyez-vous vraiment qu'un roi, deux consuls, un sous-consul et un Élitien en personne ont du temps à perdre en consacrant leur énergie à se venger d'un enfant ?
Un frisson parcourut Mathieu. Tout en parlant, il analysait les derniers jours qu'il avait passés au manoir Hidalf, à la recherche d'un indice qui lui permettrait de découvrir ce qui l'attendait, et d'y faire face.
– À votre place, déclara Olivier Tilleul d'une voix méconnaissable, j'aurais craint des représailles, mon garçon. Des représailles à la mesure de votre bêtise. Des représailles colossales.
Aaaaaaaaaaaaaaaaah ! Mon dieu ! Pourquoi mais pourquoi ??? Pourquoi cet auteur est un génie ??
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